Pour des chantiers qui respectent les locataires !

15 Sep 2019

Les chantiers de rénovation d’immeubles se multiplient à Genève. Cette augmentation s’explique par le fait que les nombreux bâtiments d’habitations construits dans les années 1960, souvent mal entretenus, doivent faire l’objet de travaux conséquents. 

Autre facteur : les rendements des investissements dans l’immobilier à Genève sont élevés. Dans un contexte incertain sur les marchés financiers, de taux d’intérêts négatifs de la Banque national et de très faibles taux des obligations de la Confédération, des bailleurs institutionnels (assurances, fondations de prévoyance, etc.) cherchent investir dans l’immobilier dans l’Arc lémanique. Rénover des immeubles est donc une aubaine. 

Ces travaux, à Genève, sont réalisés la plupart du temps lorsque les locataires sont en place. Les règles cantonales de protection des locataires (LDTR) évitent que les bailleurs chassent l’ensemble des locataires d’un immeuble avant de rénover. A Zurich par exemple, certains bailleurs ont réalisé, à l’occasion de travaux de rénovation, des opérations hautement spéculatives. Depuis la suppression par les soutiens politiques des milieux immobiliers de règles similaires à celles toujours en vigueur à Genève, des immeubles populaires ont été vidés de leurs habitant-e-s avant d’être entièrement rénovés puis reloués très chers. 

La LDTR et le droit du bail protègent efficacement les locataires contre de très fortes hausses de loyers après la rénovation. Le droit actuel est satisfaisant sous cet angle. Il ne l’est en revanche pas lorsqu’il s’agit d’assurer un cadre de vie décent durant les travaux. Les locataires sont en effet exposés à des nuisances frôlant parfois l’insupportable. 

De récentes expériences ont montré que toutes les nuisances ne sont pas indispensables et que la vie des locataires pourrait être améliorée par des mesures d’anticipation, de coordination et de planification. 

Les locataires de la rue Michel-Servet ont dénoncé la manière dont le chantier de rénovation a été mené dans leurs immeubles. Voici quelques exemples : interventions non-prévues d’entreprises dans les appartements, obligation de déménager plusieurs fois sans assistance (certains locataires étaient très âgés), étalement injustifié dans le temps de travaux particulièrement bruyants. 

Ces locataires ont régulièrement eu recours aux services de l’administration cantonale. Les inspecteurs des chantiers ont fait preuve de bonne volonté, mais leurs interventions n’ont pas permis de changer radicalement la donne. Interpellé par ces locataires et l’ASLOCA, le Département du territoire laisse entendre qu’il ne disposerait aujourd’hui ni d’une base légale ni de moyens suffisants. 

Les locataires de la rue Michel-Servet se sont réunis au sein d’une association. Avec le soutien de l’ASLOCA, cette dernière et d’autres associations d’habitant-e-s s’organisent pour élaborer une réponse à la problématique des chantiers habités. Affaire à suivre.

« Droit au logement », le Journal de l’Asloca, n°237, novembre 2018.