Droit du bail: améliorer la protection des conjoint·e·s endeuillé·e·s

11 Aug 2020

(article à paraître dans le prochain numéro du DAL, le journal de l’ASLOCA)

Le droit du bail ne protège pas suffisamment le logement de famille. Il se limite à l’attribution du logement à l’un des conjoint, titulaire ou non du bail, lors d’une séparation (MPUC) ou du divorce.

En cas de décès, le locataire survivant peut se trouver en difficulté et perdre son droit à occuper le logement dans lequel il a vécu depuis parfois des décennies. Alors qu’il est encore en deuil, son bailleur peut lui signifier qu’il occupe ce logement de manière illégale et le sommer de partir.

Le droit actuel prévoit en effet qu’en cas de décès, le contrat de bail intègre la masse successorale et revient à l’ensemble des héritiers.

Deux cas de figures peuvent alors se produire.

Si le conjoint survivant n’accepte pas l’héritage et répudie la succession, par exemple si le défunt a des dettes, le survivant doit alors quitter les lieux s’il n’est pas signataire du bail. Il ne peut en effet pas reprendre uniquement le bail et délaisser les autres actifs ou passifs de la succession.

Si le conjoint survivant ne répudie pas la succession et que le défunt a d’autres héritiers, il ne pourra faire valoir ses droits qu’avec l’accord des cohéritiers et conjointement avec eux. Ainsi, la moindre demande de réduction de loyer ou de travaux peut prendre des allures de conseils de familles et/ou devenir complexe si le survivant ne s’entend pas avec les autres héritiers ou ne les connaît pas. Les héritiers peuvent être des enfants conçus avec d’autres personnes que le conjoint survivant.

Le droit du bail doit être adapté au contexte actuel où les familles recomposées sont nombreuses et où les soins en fin de vie peuvent entraîner des dettes importantes.

Dans le cadre de mes mandats au Comité de l’ASLOCA Suisse et de Conseiller national, j’ai déposé deux interpellations destinées à résoudre ce problème.

La première interpellation (20.449) agit en amont et permet au conjoint de devenir cotitulaire du contrat de bail s’il en manifeste le désir auprès du bailleur dans les six mois dès la conclusion du bail ou après le mariage respectivement la conclusion du partenariat enregistré.

La seconde (20.450) permettrait au conjoint survivant de demander au juge l’attribution du logement dans lequel il a vécu avec le défunt. Ainsi, la répudiation de la succession n’entraînerait pas nécessairement la perte du logement de famille.

Ces propositions, si elles trouvaient une majorité au sein du Parlement fédéral – par exemple grâce au soutien du PDC – ne seraient cependant d’aucune utilité pour les concubins. En l’état des forces politiques aux Chambres fédérales, étendre cette protection à ces situations apparaît hors de portée. Il s’agira donc, tout comme il en va aujourd’hui pour les locataires mariés ou les partenaires enregistrés, d’anticiper le décès du titulaire du bail en négociant avec le bailleur ou les héritiers du locataire, l’intégration au bail du concubin ou la reprise de celui-ci. Le concubin n’a cependant pas droit au transfert du bail, sans l’aval des parties au contrat.