L’initiative 99% propose une meilleure redistribution des richesses, en augmentant l’imposition du revenu du capital, lorsque celui-ci dépasse un certain seuil, et avec un taux d’imposition 50% plus élevé que celui qui s’applique pour les revenus du travail salarié. Les montants ainsi obtenus doivent servir à baisser l’impôt des travailleurs et à augmenter les prestations à la population, comme par exemple l’accueil extra-familial, le soutien aux aînés, la politique sociale du logement.
Cette initiative s’inspire[1] des propositions d’économistes qui ont été thématisées durant la dernière campagne pour la présidence des USA par Bernie Sanders et Eizabeth Warren. Si elle ne règle pas la question des rapports de production fondés sur l’exploitation de millions de travailleur.euses dans le monde et qui menacent les conditions de la vie sur la planète[2], elle met en lumière les conséquences de trois décennies de néo-libéralisme, à commencer par la gigantesque concentration des richesses. Une poignée de multimilliardaires amassent des fortunes jamais atteintes dans l’histoire alors que plus de 800 millions d’hommes, femmes et enfants sont sous-alimentés[3] dans le monde.
La Suisse compte 735 000 personnes pauvres, qui ne parviennent pas à couvrir leurs besoins fondamentaux, tandis que 1,32 millions de personnes sont menacées de pauvreté[4]. Un rappel pour apprécier ces chiffres : le seuil de pauvreté est de 2219 francs par mois pour une personne seule, de 4031 pour une famille de quatre. A l’autre bout de la chaîne, la Suisse voit le nombre de milliardaires augmenter et, surtout, leur fortune exploser. Leurs richesses accumulées étaient[5] de 123,5 milliards de francs en 2020.
Depuis des années, la droite impose des sacrifices à la population, surtout dans le domaine des assurances sociales, mais aussi en réduisant ou en n’adaptant pas le service public au besoin des usager.ères. C’est le cas dans des domaines aussi essentiels que le logement, l’accueil extrafamilial des enfants, les soins, etc.
Ces sacrifices ont permis des baisses d’impôts en faveur des plus riches. Ce mouvement n’en finit pas. En juin, la majorité de droite au Parlement fédéral a supprimé le droit de timbre d’émission. C’est environ 250 millions de francs de cadeaux en faveur des actionnaires. Et ce n’était que la première tranche d’un projet plus vaste que le Parlement s’apprête à concrétiser, avec la suppression complète du droit de timbre (2,2 milliards de francs), celle de l’impôt anticipé (170 millions au moins) et la suppression des droits de douanes sur les produits industriels (500 millions de francs).
Ces milliards de francs qui manqueront pour financer les politiques publiques. La majorité de droite à la Commission de l’économie et des redevances, qui débat ou a débattu de ces projets, est parfaitement consciente des effets sociaux de cette politique. Elle y répond avec la sempiternelle rengaine de l’emploi et appelle religieusement à croire aux mécanismes du marché : « Enfin, si la réforme engendrera des pertes financières temporaires, la majorité est toutefois persuadée qu’elle sera autofinancée à moyen terme en raison de la création d’emplois dans notre pays qui en résultera. »[6]
Une étude[7] vient à point nommé pour rappeler que la foi n’est pas toujours performatrice, que le bonheur des actionnaires ne fait que rarement celui des salarié.es et de la majorité de la population. Cette étude montre que depuis la deuxième réforme de la fiscalité des entreprises (2011), 10 milliards de francs nets d’impôt ont été versés chaque année aux actionnaires et que cet argent n’a pas été réinvesti dans l’appareil productif. A noter que depuis la même période, des capitaux ont afflué massivement dans l’achat d’immeubles, créant une bulle spéculative dans certaines agglomérations comme Genève, qui se reporte sur les locataires. Ces baisses d’impôts peuvent nuire deux fois à la population, en induisant des coupes dans le service public et des contre-réformes des assurances sociales (AVS 21 notamment[8]), et en participant à la hausse des loyers et des prix des logements.
Le 26 septembre, votons OUI à l’initiative 99%.
(Texte paru en septembre dans la newsletter du Parti socialiste genevois.)
[1] https://www.lesechos.fr/monde/etats-unis/limpot-sur-la-fortune-le-debat-qui-monte-aux-etats-unis-1167333
[2] Pour une approche critique, cf. A. Bihr, M. Husson, Thomas Piketty, une critique illusoire du capital, éditions Page 2 et Syllepse, 2020.
[3] www.who.int/fr/news/item/12-07-2021-un-report-pandemic-year-marked-by-spike-in-world-hunger
[4] www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/situation-economique-sociale-population/bien-etre-pauvrete/pauvrete-et-privations-materielles/pauvrete.html
[5] www.letemps.ch/economie/covid-augmente-nombre-milliardaires-suisse
[6] www.parlament.ch/press-releases/Pages/mm-wak-n-2021-08-18.aspx
[7] https://theconversation.com/choc-fiscal-au-pays-du-chocolat-comment-la-suisse-sest-mise-aux-dividendes-non-taxes-161423
[8] Une des raisons invoquées par le Conseil fédéral pour justifier cette contre-réforme est la volonté de réduire la part de la Confédération dans le financement de l’AVS.