Malhonnêteté de la droite au sujet de la CPEG

04 Apr 2022

Les soi-disant « 2 milliards de plus pour la CPEG » : un pseudo-scandale inventé de toutes pièces par les ennemis des services publics

1. Les partis de droite (Le Temps du 23 mars 2022) prétendent que l’Etat aurait été obligé de trouver « 2 milliards supplémentaires » pour recapitaliser la CPEG (Caisse de pensions de l’Etat de Genève), à cause d’une décision prise par le Comité de la Caisse, en décembre 2019.

2. Pour rappel, en mai 2019, le peuple démocratiquement avait accepté de recapitaliser la CPEG : la loi 12228 avait été préférée à une loi de la droite qui démantelait les pensions de retraite et d’invalidité des infirmières, des enseignants et des agents de sécurité. La loi 12228 votée par le peuple permettait aussi à la CPEG d’accepter comme apport en capital des terrains constructibles, qui seront ainsi soustraits à la spéculation immobilière. Pour le PLR, rien d’étonnant. En effet, il est financé par les spéculateurs: moins d’argent pour la CPEG, c’est davantage de terrains pour les spéculateurs! Mais il y a plus grave: en utilisant l’argent gagné en bourse par la CPEG en 2019 (+10.3% de la fortune) au profit de l’Etat, selon les vœux de la droite, la CPEG aurait fragilisé sa sécurité financière (art. 65 LPP) – comme l’a démontré la perte subie au premier trimestre 2020 (moins 5.3%) – et donc l’avenir des pensions des assurées.

3. D’où vient la « sous-capitalisation » de la CPEG ? Il s’agit d’un choix de capitalisation partielle fait par des magistrats radicaux (aujourd’hui PLR) et PDC au tournant des années 1980 (Babel et Ducret, soit la capitalisation à 50% de la CIA, une des ancêtres de la CPEG).

Ce choix a évité à l’Etat – et donc aux salarié.e.s contribuables – de payer des milliards pour capitaliser les caisses de retraite des fonctionnaires à 100%, en période de forte inflation.

Capitaliser à 100% un tel système est absurde, c’est comme si on voulait capitaliser l’AVS, ce qui exigerait de constituer un capital de plusieurs centaines de milliards, en saignant à blanc les salarié·e·s du pays et toute l’économie dite suisse.

En effet, l’AVS fonctionne en répartition, c’est-à-dire que les actifs et actives paient pour les retraité.e.s. En revanche, le deuxième pilier privé (Loi sur la prévoyance professionnelle, LPP), fonctionne en capitalisation, c’est-à-dire que les retraites sont payées au moyen d’un capital accumulé préalablement. Le choix fait alors par la droite genevoise (libéraux, radicaux et PDC), dans des années 1980 de croissance, était un système mixte : 50% en capitalisation, 50% en répartition.

Malgré cela, avec une majorité comprenant le PLR, le PDC et l’UDC, le Parlement fédéral a décidé d’imposer une (re)capitalisation des Institutions de prévoyance de droit public (caisses de pensions) à 80% sur 40 ans, à partir du 1.1.2012.

Faire payer aux assuré.e.s actuels le « trou » (capitalisation partielle) accumulé pendant plusieurs générations serait non seulement injuste, mais également impossible.

4. La droite genevoise aujourd’hui reproche au Comité de la CPEG d’avoir pris une décision critiquable et d’avoir causé ainsi un surcoût pour les contribuables.

Ce reproche est sot et malhonnête, pour deux raisons au moins :

a. Les partis bourgeois déclarent-il incompétents les actuaires auxquels ils font appel ? Le taux technique est le taux qui sert à calculer les engagements d’une Caisse de pensions envers ses assurés.

La CPEG doit suivre les recommandations de la Chambre suisse des experts en caisse de pensions, à défaut de quoi les membres de son organe de direction deviendraient responsables de toute incapacité de l’institution de prévoyance à remplir ses engagements envers les assurés.

Le taux d’intérêt technique de la CPEG était de 2,375% en 2019.

En 2019, le taux technique moyen des institutions de prévoyance publiques en Suisse était de 1,96% et celui des institutions de prévoyance privées, plus prudentes, était de 1,71%.

En 2020, la moyenne était de 1,85% pour les institutions publiques et de 1,57% pour les institutions privées.

Quant au taux maximum admis par la Chambre suisse des experts en caisse de pensions (directive DTA4), il était, en appliquant les tables générationnelles, de 2,13% au 30 septembre 2019 et 1,98% au 30 septembre 2020.

Il s’ensuit que la décision du Comité de la Caisse, d’abaisser le taux technique à 1,75% était dictée par la raison et par les obligations prudentielles de ceux qui l’ont prise.

Critiquer cette décision, pour des raisons politicardes, comme le font les partis bourgeois tel que relaté par Le Temps du 23 mars, est pure démagogie.

b. Dans la brochure de votation de 2019 (p.20), le Conseil d’Etat écrivait : «Sur la base de la situation financière de la CPEG au 1er janvier 2019, avec un taux technique de 2,0% et un rendement de la fortune de 3,0% le montant de la recapitalisation est estimé entre 4,4 et 5,4 milliards de francs pour se conformer à la loi sur la CPEG, dont environ entre 200 et 300 millions de francs seront versés par les autres employeurs affiliés non subventionnés par l’Etat de Genève.»

A la lecture des comptes de la CPEG pour l’année 2019 , on constate un taux de couverture de 53,9%, soit une recapitalisation nécessaire de 21,1% ou 5 milliards et 482 millions, soit 82 millions de plus que le maximum qui avait été anticipé par le Conseil d’Etat.

Cependant, 14,5 millions de ce surcoût sont dus à un arrêt du Tribunal fédéral de juin 2019, soit après la votation.

Surtout, un coût qu’on peut estimer, au moins, à 600 millions est dû au passage du taux technique de 2% à 1.75%, un choix dicté par la prudence et préconisé par la Chambre suisse des experts en caisse de pensions (voir a. ci-dessus).

Quant au changement des tables actuarielles, mesure qui a couté environ 600 millions également, elle a été partiellement financée par la dissolution de la provision pour longévité, à hauteur de 468 millions.

Ces deux mesures, la baisse du taux technique et le changement des tables actuarielles, ont pu être réalisées sans surcoût important pour les contribuables, grâce à la bonne performance de la CPEG.

En critiquant ces choix prudents, les pompiers pyromanes de la droite se révèlent en réalité furieux que la CPEG soit remise enfin sur une base financière solide, contrairement à leurs prévisions catastrophiques faites pendant la campagne de votation.

Défendre à long terme les pensions des infirmières, si indispensables tous les jours et pour tous et toutes, défendre les services publics qui répondent aux besoins essentiels de la population est pour les serviteurs des privilégiés pur gaspillage. Car ils privilégient les intérêts d’une petite minorité face aux intérêts sociaux de la vaste majorité populaire.

Les riches et super-riches défendus par la droite n’ont pas besoin de ces prestations, car ils peuvent satisfaire leurs exigences dans le secteur privé. Les super-riches peuvent se soigner avec leur argent de poche. La droite aurait voulu saigner financièrement les pensions des infirmières. Voilà le vrai scandale.

Le Comité de la CPEG y a mis un frein. Il a besoin de l’appui justifié de la population.

Alberto VELASCO

Christian DANDRÈS

Romolo MOLO

Texte publié sur https://www.infoalternativecpeg.org/