Hausse des taux hypothécaires : Que faire?

13 Jun 2023

Les locataires doivent faire face à l’inflation qui réduit leurs capacités financières et entraînent pour certain.es des hausses de loyers. Il va falloir maintenant affronter la hausse du taux de référence. Depuis le 1e juin, celui-ci est passé à 1,5% sous l’effet de l’augmentation des taux hypothécaires par les banques. Des bailleurs vont tenter d’en profiter.

Comment le taux peut-il impacter votre loyer ?

Si vous disposez d’un bail d’un an, renouvelable d’année en année, votre bailleur pourrait vous notifier un avis de majoration de loyer pour la prochaine date du renouvellement du bail (échéance contractuelle). Pour les locataires qui ont signé un bail de 5 ans, renouvelable de 5 ans en 5 ans, le taux pourrait justifier une hausse de loyer pour la fin d’une période de 5 ans. L’avis doit vous être adressé 3 mois au moins avant cette date. Le pourcentage de la hausse dépend du taux de référence au moment où le loyer a été modifié pour la dernière fois. Pour les baux de 5 ans, ce taux est celui en vigueur au moment le bail s’est renouvelé. Une augmentation de 0.25% du taux peut entraîner une hausse de 3%.

Les baux de 5 ans se sont multipliés ces dernières années et peuvent devenir un cycle infernal. L’inflation et le taux de référence s’alternent et génèrent des hausses continues de loyer, année après année. Durant les 5 ans, le loyer augmente avec le coût de la vie – 3,56% depuis 2022 – et au renouvellement du bail, le propriétaire invoquera la hausse du taux de référence pour majorer encore le loyer sur lequel suivront les hausses liées à l’inflation pour les 5 ans suivants

Alors que faire ?

Il faut tout d’abord vérifier le calcul, en déterminant le taux de référence applicable à votre bail.

La date à laquelle le loyer a été augmenté pour la dernière fois. Si le loyer n’a pas changé depuis 2017, il se peut que l’augmentation du taux de référence ne puisse pas servir de motif à majoration de loyer. Il faut faire une comparaison entre le taux de référence en vigueur au moment où le loyer a été modifié pour la dernière fois, et le taux actuel. Attention ! si vous acceptez une hausse de loyer, le taux de référence applicable pour votre bail sera réactualisé, même si le calcul est faux. Des bailleurs ont en effet pour habitude d’envoyer de petites majorations de loyer que les locataires ne contestent pas mais qui réajustent le taux. Il s’agit en réalité d’un stratagème pour « remettre les compteurs à zéro » et faire perdre aux locataires la baisse à laquelle ils auraient eu droit.

Il faut ensuite toujours s’opposer à une hausse de loyer sur le taux de référence. Le locataire peut, dans de nombreux cas (si l’immeuble a été acheté ou construit il y a moins de trente ans) faire valoir que le loyer est déjà trop abusif et ne peut encore être augmenté avec le taux de référence. Pour rappel : le locataire qui reçoit un avis de majoration à 30 jours pour le contester. Si le document est envoyé en recommandé, le délai commence à courir le lendemain du jour où la lettre a été retirée pour autant qu’elle le soit dans le délai de garde qui est, en principe, de sept jours après que le facteur ait déposé le papillon annonçant la lettre recommandée dans la boîte aux lettres du locataire.

Pour les baux de cinq ans renouvelables de cinq ans en cinq ans, le locataire doit demander plus de trois mois avant le renouvellement du bail une baisse de loyer. Celle-ci est possible si le loyer n’a pas changé depuis 2017.

La plus grande marge de manœuvre pour protéger les locataires contre les loyers abusifs est la contestation du loyer initial. Il est fondamental de contester le loyer initial dans les trente jours dès la remise des clés du logement ou la formule officielle verte (avis de fixation du loyer initial).

Encouragez vos proches et vos voisins à contester les loyers initiaux.

Si le loyer n’est pas contesté, la marge de manœuvre est ensuite beaucoup plus faible. Le Tribunal fédéral a considérablement réduit la marge de manœuvre des locataires dans des arrêts pro-bailleurs.

Politiquement, le changement rapide des paramètres utilisés pour calculer le loyer, cumulés avec des salaires qui ne suivent pas, et ce depuis plusieurs années, appauvrit massivement les locataires qui sont la majorité. La Constitution exige que la Confédération prenne des mesures pour lutter contre les abus dans le domaine locatif. Les solutions sont simples, même sans révolutionner le droit existant. Il suffirait, pour éviter de mettre la corde au cou des locataires, de geler les loyers pendant cette période d’inflation aigüe et de laisser aux bailleurs la charge de démontrer que sans hausse de loyer, ils n’obtiendraient pas le rendement auquel la loi lui donne droit. Cette simple mesure permettrait d’exclure sans doute la majorité des hausses de loyer.

Le Conseil fédéral et le Parlement ne font rien. Depuis des mois, PARMELIN multiplie les tables rondes, en donnant le sentiment qu’il ne dispose pas de marge de manœuvre suffisante pour agir. Dans une opération de communication habile, il déplace même sur le terrain de la pénurie de logements, le problème de la crise qui est avant tout aujourd’hui une crise sociale liée à des loyers inabordables. De facto, le Conseil fédéral tient le même discours que les milieux immobiliers qui considèrent que la seule et unique solution au problème du logement dépend de l’offre et de la demande. Dans un canton comme Genève, la pénurie sévit depuis 1975. Cet angle d’attaque équivaut à renoncer à agir pour garantir le droit au logement et mettre un terme aux abus des bailleurs.

Une initiative populaire est indispensable pour protéger les locataires.

Christian Dandrès

À paraitre dans le journal Droit au logement de juin 2023.