Se réapproprier le système de santé

19 May 2025

Le domaine de la santé concerne l’ensemble de la population. La Constitution demande à la Confédération de garantir des soins médicaux de base suffisants et de qualité. Cet objectif n’est pas atteint.

Un quart de la population renonce à se soigner faute d’argent. Les franchises à 2’500.- Fr. devaient soulager les jeunes en bonne santé. Aujourd’hui, beaucoup doivent y recourir face à des primes insupportables. Cumulées à la quotepart à charge des patient·es et à des réseaux de soins contraignants, ces mesures discrimineront les classes populaires et moyennes. L’augmentation de la franchise minimale et la taxe sur les urgences voulues par la majorité parlementaire vont encore aggraver la situation.

L’organisation et les objectifs assignés par les autorités fédérales au secteur des soins menacent aussi les conditions de travail des prestataires de soins et des personnels de santé (237’000 personnes uniquement dans les hôpitaux). La majorité de ces emplois sont occupés par des femmes (74%). La Confédération impose aux cantons de privilégier le secteur privé lorsqu’il peut fournir les soins à moindres coûts. Elle veut concrètement privilégier les hôpitaux qui paient les salaires les plus bas (race to the bottom, dumping salarial).

Des groupes cotés en bourse sont très présents, comme le duopole de cliniques privées et les grandes pharmas. Ils pèsent de tout leur poids sur les autorités et ont obtenu des profits quasiment garantis par la loi. Les cliniques privées peuvent facturer sans limite et sans contrôle budgétaire par les cantons. Quelle entreprise obtient un tel chèque en blanc au détriment d’une assurance sociale ?

Une loi au profit des assureurs privés

La loi a aussi été remaniée pour le profit des assureurs privés. Depuis 2012, ceux-ci peuvent faire supporter par la communauté des assuré·es à l’assurance obligatoire les coûts de cliniques qu’ils assumaient auparavant.

La loi sur l’assurance maladie est une assurance sociale très incomplète. Elle garantit cependant une certaine solidarité entre malades et bienportants ainsi qu’entre les générations. En effet, les primes ne varient pas entre jeunes adultes et les assuré·es en fin de vie. La fin de la solidarité entre malades et bien-portants vient avec le rationnement des soins accessibles avec la seule assurance-maladie de base. C’est déjà une réalité pour une majorité d’assuré·es ayant «choisi» un réseau de soins. Elles et ils doivent se contenter de soins que leurs assureurs estiment indiqués. Rappelons que les assureurs ne sont pas soumis au serment d’Hippocrate. Le libre-choix du médecin est garant de l’indépendance des médecins vis-à-vis des assureurs.

Pour lutter contre ces attaques et reconquérir ce secteur, il faut jeter des ponts entre usager·ères du système (patient·es et assuré·es), prestataires de soins (médecins de ville, etc.) et les personnels de santé. Conditions de travail et qualité des soins sont intimement liées.

Coalition intercantonale pour une véritable politique de santé

C’est dans ce sens que s’organise une plateforme dénommée Coalition intercantonale pour une véritable politique de santé. A l’invitation du Syndicat des services publics (SSP-VPOD) et avec l’AVIVO, une première réunion s’est tenue à Berne. Son objectif est de fédérer les organisations et les groupes qui partagent un même constat et veulent le rendre véritablement démocratique, intégrateur, social et capable d’englober la santé dans toute sa complexité, notamment la prévention.

Christian Dandrès

Article publié en mai 2025 dans le journal de l’AVIVO.