Madame la Présidente de la Confédération,
Mesdames les Conseillères fédérales,
Messieurs les Conseillers fédéraux,
Ayant été interpellé par plusieurs de nos concitoyen.ne.s, je me permets de vous adresser cette lettre.
Des Suissesses et Suisses de l’étranger vivent dans les régions frontalières.
Environ un cinquième de ces résident.e.s seraient âgé.e.s de plus de 65 ans.
Il s’agit de personnes à risque, dans le contexte de pandémie actuelle, et qui ont pour certaines d’entre elles recours à la solidarité de leurs proches pour leur ravitaillement notamment en aliments et en médicaments.
C’est ainsi que des Suissesses et des Suisses sont amené.e.s à devoir franchir les frontières avec des marchandises destinées à leurs proches.
Plusieurs d’entre elles m’ont indiqué avoir été informées qu’elles ne seraient plus autorisées à le faire depuis le 1er avril.
Une situation a plus particulièrement retenu mon attention.
Il s’agit de Suisses domiciliés à Genève et dont les parents, âgés de plus de 75 ans, vivent en France et sont tous deux atteints dans leur santé. Je précise qu’ils sont affiliés à l’assurance maladie suisse et sont suivis par des médecins en Suisse. Ils vivent isolés en France voisine du canton de Genève et sont assistés par leurs enfants, tous domiciliés en Suisse. Ces derniers leur apportent, plusieurs fois par semaines, des produits de première nécessité, des aliments et des médicaments prescrits par leurs médecins suisses.
Toutes ces marchandises sont acquises en Suisse.
Ces enfants ont été informés, par des agents des douanes suisses, qu’ils ne pourraient plus porter assistance à leurs parents, comme ils l’ont fait jusqu’à ce jour.
Les douanier.ère.s auraient reçu un ordre d’engagement en ce sens.
A teneur de l’Ordonnance 2 COVID-19, l’Administration fédérale des douanes (AFD) n’est pas autorisée à instituer une interdiction de franchissement des frontières à des postes dont elle n’aurait pas décidé de la fermeture.
Une telle interdiction apparaît par ailleurs en contradiction avec les devoirs d’assistance et de simple humanité qui dictent le comportement des personnes appelées à soutenir des proches résidant dans la zone frontalière.
Il en va également de l’article 24 alinéa 2 de la Constitution fédérale.
Je vous prie dès lors de veiller au respect par l’Administration fédérale des douanes des intérêts et des droits des Suissesses et des Suisses de l’étranger ainsi que de leurs proches.
Je me permets d’adresser une copie de cette lettre à Monsieur Christian Bock, Directeur de l’AFD, ainsi qu’à Monsieur Antonio Hodgers, Président du Conseil d’Etat genevois.
De même qu’il en va pour les questions posées par les parlementaires à votre Conseil lors des sessions, je rends public ce courrier notamment sur mon site Internet www.christiandandres.ch.
En vous remerciant de la suite que vous donnerez à cette lettre, je vous prie de croire, Madame la Présidente de la Confédération, Mesdames les Conseillères fédérales, Messieurs les Conseillers fédéraux, à l’assurance de ma haute considération.
Christian Dandrès, Conseiller national
le 5 avril 2020
A la suite de cette interpellation, j’ai obtenu une réponse de l’AFD que je remercie pour sa diligence.
Avec l’autorisation de son auteur, je reproduis le contenu du message reçu :
“Monsieur le Conseiller National,
Tout d’abord, je tiens à vous remercier pour avoir porté ces cas de rigueur excessive à ma connaissance. Dans de tels cas, et même si la fermeté est de mise, il convient d’appliquer les dispositions légales avec bon sens. L’esprit de la loi doit prédominer sur une application stricte.
Pour faire suite à notre entretien téléphonique de ce jour, je vous confirme que je suis intervenu auprès de mes collaborateurs afin qu’ils prennent davantage en compte la bonne foi des personnes résidant en Suisse qui viennent en aide à un ou plusieurs parents domiciliés en France voisine en leur apportant des médicaments. Le retour en Suisse de ces personnes ne devrait dès lors plus poser de problème.
Je me tiens à votre disposition pour tout renseignement que vous jugeriez opportun ; n’hésitez pas à me contacter au besoin.
Dans l’attente de votre compréhension, je vous prie de croire, Monsieur le Conseiller National, à l’expression de mes plus cordiaux messages.
col Jean-Luc Boillat
chef Douane Ouest”