Communiqué du Parti socialiste genevois (25/02/2021) : Les personnes sans statut légal seraient la cible depuis quelques semaines de contrôles intensifs menés sur le territoire genevois par le corps des garde-frontières. Contrastant avec la gravité d’une telle opération présumée de chasse aux sans-papiers en pleine crise sociale, les réponses des autorités fédérales et cantonales entretiennent un flou absolu sur les responsabilités engagées. Les Socialistes dénoncent des contrôles indignes et exigent des explications.
Une chasse aux sans-papiers en pleine crise sociale !
Les associations actives dans la défense des personnes sans statut légal ont alerté il y a quelques semaines sur la véritable « chasse aux sans-papiers » dans laquelle semble s’être lancé le corps des garde-frontières à Genève depuis le début de l’année. De très nombreux contrôles d’identité ont en effet été rapportés dernièrement, avec à la clé, pour les personnes concernées, des décisions d’interdiction d’entrée sur le territoire et des menaces de renvoi. La peur générée par ces contrôles entraîne des conséquences concrètes pour l’ensemble de la population genevoise, comme en témoigne la fermeture du centre de distribution de colis alimentaires à Thônex le 9 février.
Les mots manquent pour qualifier la bassesse d’une telle opération. Viser de cette manière une population aussi précaire en plein cœur d’une pandémie mondiale et d’une crise sociale sans précédent, est révoltant et indigne de la tradition d’ouverture de Genève.
D’où viennent les ordres ?
Lors du premier confinement, les Socialistes avaient déjà dénoncé l’excès de zèle des agent-es des douanes à Genève, lesquel-les avaient cru bon d’interdire à certain-es ressortissant-es de franchir la frontière pour se rendre au chevet de leurs proches malades installé-es en France voisine. Si cette fois les contrôles dénoncés ont eu lieu non pas (uniquement) à la frontière mais sur l’ensemble du territoire cantonal et en particulier dans et aux abords des transports publics, ce n’est pas la police cantonale mais bien à nouveau les garde-frontières qui sont à l’œuvre.
Pourtant, l’Administration fédérale des douanes (AFD) nie toute opération ciblant les personnes sans-papiers. Le Conseil d’Etat de son côté assure lui aussi n’être au courant d’aucune mesure en ce sens. Cette incapacité à établir d’où viennent les ordres est révélatrice des problèmes sérieux que soulèvent les prérogatives étendues des garde-frontières dans notre canton. Pour les Socialistes, la délégation de tâches aussi sensibles dans une telle opacité n’est pas acceptable.
Double offensive socialiste
Au vu du contexte extrêmement préoccupant décrit plus haut, il importe aujourd’hui de connaître précisément l’étendue et la nature des tâches déléguées aux garde-frontières à des fins de police, ainsi que le cas échéant les directives données par l’AFD à ses agent-es en matière de contrôles d’identité sur la voie publique.
Fort-es de leur présence à Genève et à Berne, les Socialistes interpellent dans une double offensive les autorités cantonales et fédérales afin de faire toute la lumière sur les conditions entourant les contrôles menés par les douanes suisses à Genève et qui ont conduit à la fermeture d’un point de distribution alimentaire en pleine crise sociale et sanitaire. Deux textes seront déposés aux prochaines sessions parlementaires des 4-5 mars et 1-19 mars, respectivement à Genève et à Berne.
Le PS genevois espère obtenir rapidement des explications et des réponses claires à ses questions afin que les pratiques dénoncées cessent et qu’une telle vague de contrôles ciblés ne se reproduise pas. Finalement, cette situation démontrant une nouvelle fois l’extrême précarité dans laquelle vivent les travailleurs-euses sans statut légal et leur famille, le PS rappelle la nécessité de voter OUI le 7 mars prochain à l’indemnisation des travailleurs-euses précaires, pour que les droits de celles et ceux-ci soient enfin pleinement reconnus et respectés, et ce quel que soit leur statut légal.
INTERPELLATION DÉPOSÉE AU CONSEIL NATIONAL
Contrôles douaniers sur la voie publique et ciblage des sans-papiers
Début février, des associations genevoises de défense des sans-papiers ont dénoncé des contrôles d’identité et de permis de séjour menés par des gardes-frontière suisses ciblant des personnes sans statut légal. Ces contrôles ont été effectués dans les transports publics, sur territoire genevois sans aucun lien avec d’éventuels franchissements de frontière. Cette pratique contribue à instaurer un climat de peur et de méfiance quotidienne auprès de gens qui participent pleinement à la vie économique et sociale de notre pays. Les personnes sans-papiers, ne bénéficiant d’aucune protection sur le marché du travail, sont généralement parmi les plus touchées en période de crise économique.
En menant ces contrôles d’identité et de permis de séjour sur et autour des transports publics notoirement utilisés par les employées de l’économie domestique pour de rendre sur leurs lieux de travail, l’Administration fédérale des douanes procède de fait à un ciblage des personnes sans-papiers. Elle engage des gardes-frontière sur la voie publique afin de mener une politique de répression à l’égard des personnes en infraction à la loi sur les étrangers. A Genève, un accord conclu en 2013 entre les autorités cantonales et la Confédération permet aux corps des gardes-frontières d’intervenir sur tout le territoire cantonal. La question d’un développement et d’une généralisation de ce type de pratiques au niveau national se pose, notamment dans le cadre de la révision de la loi sur les douanes.
1. Combien d’accords (art. 97 LD) ont été conclus entre la Confédération et les cantons qui permettent une intervention des gardes-frontière sur la voie publique hors de l’espace frontalier ?
2. Selon quels critères l’Administration fédérale des douanes engage-t-elle des contrôles sur la voie publique hors espace frontalier ? Les lieux pouvant potentiellement accueillir davantage de personnes sans statut légal sont-ils recherchés et privilégiés, à Genève et dans d’autres cantons ?
3. L’Administration fédérale des douanes procède-t-elle à une appréciation des conséquences de ces interventions contre les sans-papiers sur leur dignité élémentaire et leur droit à un minimum d’existence, s’agissant de contrôles opérés sur les lignes de transport publics menant aux lieux de travail ?
3. La révision de la loi sur les douanes risque-t-elle d’impliquer un développement et une généralisation de ce type de pratiques sur l’ensemble du territoire national ?