LPP 21 : Taillé pour les assureurs !

01 Sep 2021

Le Conseil national débat de la révision du projet du Conseil fédéral sur la prévoyance professionnelle (LPP 2021). Dans la droite ligne d’AVS 21, la droite a validé, au sein de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national, la réduction du taux de conversion, soit une baisse des rentes.

La droite a massivement péjoré l’accord entre les organisations patronales et l’Union syndicale suisse (USS), qui prévoyait d’atténuer la casse par un supplément de rente. Il s’agissait d’introduire un élément de répartition – soit de solidarité – dans le système du 2e pilier, fondé sur la capitalisation. Tout comme elle l’a fait avec AVS 21, la droite a réduit de plus de moitié les maigres compensations proposées par le Conseil fédéral (0,8 au lieu de 1,7 milliard). Surtout, le financement de la compensation s’arrête aux salaires supérieurs à 85 320 francs! Une exception: une majorité de la commission parlementaire accepte d’assujettir à la LPP les travailleurs-euses à faibles revenus. L’affiliation deviendrait obligatoire à partir de 12 548 francs, au lieu de 21 510 francs aujourd’hui. 

La droite ne lâche rien sur les retraites et sa volonté de briser les solidarités. Les femmes, les jeunes et les assuré-e-s à petits revenus vont payer l’addition. 

Avec son initiative populaire sur les rentes, la droite veut aussi inscrire dans la Constitution l’obligation de repousser l’âge de la retraite à 66 ans pour toutes et tous, puis lier cet âge à l’espérance de vie moyenne. Elle s’assurerait ainsi d’écarter du débat politique la question des besoins des travailleurs-euses, de la différence de revenus des femmes et du fait que celles-ci assument majoritairement du travail (care) non pris en compte dans le deuxième pilier. Cette initiative ignore aussi le fait que l’espérance de vie, notamment en bonne santé, est fortement corrélée au niveau d’éducation et, surtout, de revenu. En outre, les riches font largement usage de la retraite anticipée à 58 ans dans le 2e pilier, alors que la caissière devra travailler au-delà de 64 ans ! 

Ces contre-réformes servent à double titre les intérêts des assureurs privés:  ceux-ci vendront davantage de produits du 3epilier, encore plus profitables que ceux que leur assure indûment la prévoyance professionnelle (2e pilier).

En effet, les assurances qui pratiquent la LPP ou qui couvrent les risques d’une institution de prévoyance ont obtenu de l’ancien conseiller fédéral (PLR) Hans-Rudolf Merz la possibilité d’accaparer une quote-part minimale de 10% non pas sur les excédents (profits), mais sur les primes de risque, les frais et le produit net du capital ! 

Cette garantie de profit minimal, donnée par l’Etat à des actionnaires privés, grève la moitié des assuré-e-s du 2e pilier. Il s’agit d’un scandale dans une assurance sociale obligatoire. La perte pour les assuré-e-s est immense: à titre d’exemple, pour la seule AXA Assurances, entre 2007 et 2016, elle se monte à 1,67 milliards de francs ! Entretemps, Axa n’a gardé que l’assurance risque du 2e pilier et elle rejette toute compensation de la baisse du taux de conversion pour les autres assureurs, qui ont constitué de larges réserves afin de pouvoir payer les rentes en cas de maintien de ce taux à 6,8% ! Mieux connectée avec les politiciens de droite qui font les lois, Swiss Life profitera de la solution de la Commission du National et pourra distribuer à ses actionnaires les réserves accumulées pour faire face à un éventuel maintien du taux de conversion. L’assurance sociale très imparfaite qu’est le 2e pilier doit cesser d’être un self-service pour les assurances. L’AVS doit être renforcée et les retraites, qui sont un salaire social différé, doivent enfin couvrir les besoins, comme l’exige la Constitution.

(Article à paraître dans le prochain numéro de Services publics, le journal du SSP.)